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Fleurs de Sang
2 mai 2007

Livre de Vie : Inde

Bombay . Cette ville me tuera .
Cela fait maintenant 8 mois ; Non, un an que j'y traine mes guetres comme le dernier des pauvres paumés blanc que l'on rencontre en Inde .
Voyage d'agrément .... Connerie oui .
La vie ici vous brise comme une brindille, et pourtant il est impossible d'en partir . Impossible de retrouver la vie d'avant, le travail, la propreté, le silence .
13 mois maintenant que cette machine en explosant m'a privé de la vue du coté droit, mais m'a ouvert les yeux . Défaut de fabrication . Accident de travail .
Putain d'accident de malchance oui .
La rente est largement suffisante pour survivre dans le plus misérable des hotels perdu entre bordels et revendeurs étranges , sorte d'apologie de la démerde . On y trouve tout ce que l'on veut, du lance roquette au peroquet, sans oublier la drogue, et les putes . Tout ce qu'ils demandent tient en ce mot magique , qui ouvre toutes les portes et vous laisse à jamais étranger . Dollar .
Ma malédiction, mon péché et ma bouée de sauvetage .
plus rien à faire, plus rien à vivre . la chaleur me tue moins que leur religion fataliste et rigide à en pleurer.
Ils sont soit trop intelligent, soit illétrés . impossible d'avoir une discussion , ils vous voient venir et ne font qu'une bouchée de vos véléitées narratives . Vous n'êtes qu'un Dollar et rien de plus .
Fataliste ? comment ne pas le devenir quand il faut incéssement ce defendre sous peine de perdre le peu d'humanité qui me reste encore .
Allongé sur mon lit, je n'en peux plus . Le ronflement du ventilateur n'arrive qu'à peine a couvrir le vrombissement des mouches, et ne fait que remuer la puanteur moite de cette fin de mousson .
Sortir . Fouiller ses poches et trouver un vieux billet de 5 dollars pour se payer une biere et une fille . Je la veux blonde et fraiche .
La biere évidemment .
Les marches grincent sous mes pas tandis que je boite dans les escaliers .
Je me croise dans un vieux triangle de miroir cassé .
Je fais peur . Ma barbe autre fois blonde n'est plus qu'un amas de fils de fer sans âme . La cicatrice me defigurant ne rendant que plus tangible le bleu de mes yeux .
Oui, j'étais beau . avant qu'un an de misére ne me fasse ressembler à un mauvais pirate de série B .
Deux pas dans la rue et mon genou me fait déja souffrir . Deux gamins piaillent en se disputant un balon troué remplit d'un vieux linge . Cela pue la misére et l'insouciance, je suis à deux doigts d'en vomir .
Tian Yin . Je ne sais pas ce que celà veut dire, et le vieux Tian ne le sait pas non plus . Pourquoi ce nom emprunté a un décors bien plus chinois qu'hindou ? je ne le saurait surement jamais . Je voit une lueur de convoitise lorsque j'entre dans sa boutique . Il rajuste son turban d'une voix sure, et prononce d'un anglais poli par des années de commonwealth les formules alambiquées tirées d'un autre temps .
Je n'en ai que faire, et mon geste de la main le fait vite comprendre .
Il se renfrogne .
Il commence a me connaitre . je ne suis pas un riche étranger, juste un paumé . Et je commence a le connaitre lui aussi . Au diable sa vérole et sa Biere coupée .
Il me montre une caisse soit disant à peine ouverte, dont les clous rouillés et tordus seraient une preuve suffisante pour faire remonter le breuvage à la deuxieme guerre mondiale . Mais il me fait payer 10 fois moins cher qu'une bouteille dans le Marais, alors je lui en prends trois .
Je le salue d'un air las, la fille m'attend déja à l'hotel .
La remontée des marches est encore pire qu'avant . Je fais sauter la capsule avec les dents et la recrache dans les escaliers, avant de boire une longue gorgée . Le liquide me brule de fraicheur et d'acidité . immonde salopard . je lui ferai boire tout son stock si il me redonne un tel poison . Deuxieme gorgée, et je m'habitue . L'homme s'adapte à tout . Même à la crasse, même à la médiocrité , même à sa propre déchéance .
Je juge la fille comme je l'ai fait il y a un instant pour la biere .
Sans pitiée, je l'ai payée et n'en ai plus rien à faire .
Elle est svelte . normal, vu ce qu'elle doit avoir à manger ...
Je lui fait comprendre par signe qu'elle doit se deshabiller . Et j'attaque ma deuxieme biere .
Elle commence un simulacre de Strip Tease que je fais césser immédiatement . Je ne suis pas là pour ça. Assez de simulacres . Ses mains sur ma ceinture .  Malhabile, elle commence à me redouter . qu'on en finisse . je la jette sur le lit et la prend, sauvagement . Le contact de sa peau douce me surprend . Inatendu, presque violent . Je la hais d'autant plus pour cela . D'une main , je lui tire les cheveux , pour l'entendre crier, et me penche sur sa croupe . Les bruits sont habituels dans l'hotel , et les clients ne viennent pas ici pour le standing .
Le nez dans ses cheveux, je ne voit plus rien . l'odeur de sa nuque me fait défaillir, souvenirs m'abordant avec la puissance d'une bombe . J'en prends plein la gueule, je suffoque, voit des lumieres etranges apparaitre dans le coin de mes yeux . Toute une année de saloperie qui me revient dans la tronche sous forme de mauvaise conscience . J'en vascille, lui lache les cheveux . Elle me regarde , supris, porter les mains à mon visage . Une larme sur sa joue, et pourtant, elle me plaint . j'en pleurerai si je savais encore comment faire .
Je me retire d'elle, et m'assied sur ce lit miteux, a moitiée nu, drapé de ma santé mentale en lambeau . Je vois double , triple, comme une cuite au champagne sans les petits fours . Elle passe une main dans mon dos, me caressant d'un geste . Je m'effondre, et pleure sur ma putain d'existence .
Elle me masse, en silence, associée silencieuse dans mon temoignage de la décadence de ce monde .
Je me prenais pour une victime, elle ne l'est pas .
Et je continue doucement à pleurer, toutes les larmes de cet oeuil qui ne s'ouvrira plus, je pleure ma séduction, ma vie future, mon innocence . l'intelligence est le pire des fardeau, la pire des plaies, et la culture n'est que sel sur cette blessure .
Dans sa comprehension simple, elle est belle . Je me retourne , et lui fait peur . Elle pense que je suis revenu . mais je n'existe plus, suis autre . je lui prends doucement la taille , et monte ma main doucement vers ses seins, tout en lui parlant doucement .

Dans les rues de la ville, il y a mon amour. Peu
importe où il va dans le temps divisé. Il n'est plus
mon amour, chaqu'un peut lui parler. Il ne se souvient
plus ; qui au juste l'aima ?

René Char, premiere strophe d'allégeance . Pourquoi lui , pourquoi maintenant . Je ne veux pas le savoir . et je continue à reciter, doucement, tout en massant délicatement la pointe de ses seins . Elle est mate de peau, et velle, je m'en apercoit maintenant . Dans sa nudité, elle à la grace d'une reine . Et je m'énivre de la savoir dans mes bras, princesse mythique d'une histoire sans pareille, je l'imagine amoureuse folle de l'aventurier borgne que je suis . Je divague et me laisse faire . Que ma joie demeure , c'est tout ce que je demande . Elle sourit, et ses dents nacrées me font perdre la tête . Une femme de Tyan, aussi belle, que se passe t'il, je sombre, non, je m'envole . je lui caresse le menton pendant que ses mains m'enserrent . elle se penche et m'acceuille en elle, en souriant .

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Commentaires
I
Même si je pouvais m'en douter, je ne savais pas que tu écrivais, et bien qui plus est<br /> (je sens que je saisis pas tout mais aujourd'hui je ne suis pas champignonné).<br /> Détaché, teinté de malaise, mais délavé par un désintérêt évident le texte rend très bien compte de l'état d'esprit que provoque ce pays étrange sur un occidental. Intéressant, agréable, original mais sans fioritures, à mes yeux, ce texte décrit la vie dans des recoins où l'on ne la distingue généralement pas, mais où pourtant on la vit parfois.<br /> <br /> Que ma joie demeure... tu t'es mis a Giono? <br /> Si oui, j'en appelle aux écureuils du monde entier pour subvenir a tes besoins quotidiens afin que tu puisse lire son oeuvre d'une traite en t'alimentant de noisettes et autres noix...<br /> Cet homme là a tout compris, de la nature à l'homme, aux fièvres et autres rêveries (lisez Jean le bleu) jusqu'à ce besoin d'histoires et de récits qui nous est inhérent(lisez le serpent d'étoiles). <br /> En t'encourageant à continuer pour toi, pour les autres et pour l'écriture<br /> <br /> Guillaume
C
un vrai talent ... a trvailler ca tombe bien y ont dit qu'il fallait travailler plus !!!
E
J'aime aussi... c'est poignant !!
J
J'aime.
S
J'ai bien.<br /> Un peu saccadé dans la forme. Peut-être. Mais. Ca soutient bien le fond. (tu vois ce que je veux dire...?)<br /> agree^^
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